samedi 9 mai 2009

Mon « élevage de poussières sténonumériques »

Photo Yannick Vigouroux,
« Port-en-Bessin, Normandie, 2009 »,
de la série « Littoralités [numériques] »
(sténopé numérique / Digital pinhole)





Jaime conserver les poussières qui résultent de l'utilisation de mon sténopé numérique (le capuchon en plastique percé d’un trou qui remplace l’optique brisée n’est pas parfaitement étanche), en référence notamment au cinéma d'épouvante japonais contemporain : dans Ring (1998) des mouches ou insectes sombres polluent, occupent l'écran de télévision, dans un bourdonnement oppressant...

Jean-Louis a évoqué « L’Elevage de poussières » (1920) photographié par Man Ray sur « Le Grand Verre » cassé de marcel Duchamp, je n’y avait pas pensé, mais j’aime l’idée de « cassure » en particulier.

J’aime malmener la technologie, l’idée de la briser littéralement en arrachant une optique. Dans Ring justement, la malédiction est transmise par différents appareils : téléphones, écrans de télévision, magnétoscopes contaminants… et bien sur révélées par des appareils-photos (les visages sont horriblement déformés dans les photos produites) ! J’en parlais avec Didier hier au téléphone, après avoir cité Willy Ronis, qui m’a confié récemment que lors de sa longue carrière, il n’avait jamais eu envie d’utiliser des boîtiers haut de gamme, leur préférant des Rolleiflex bi-objectifs et des Foca (dont les optiques sont d’ailleurs d’excellentes qualité) : rejet de la part de Didier comme de la mienne du fétichisme des appareils et des marques, qu’il s’agisse d’un Diana en plastique désormais à la mode, ou d’un onéreux Leica ou Hasselblad. L’ « appareil-photo n’est qu’un outil », comme le dit Didier, au mieux une « machine à poésie », pour reprendre la belle expression de Nancy Rexroth.