http://www.flickr.com/photos/24544585@N06/sets/72157619934528737/
http://pamelamessiblogspot.com
http://librepensine.blogspot.com
Cette photographie, une surimpression accidentelle, que j'aime légender « L'homme qui tombe », issue de ma collection de « photos trouvées », vient d'être publiée dans le numéro 3 de la revue « « L'HELIOTROPE » :
http://www.heliotrope-online.com/index.php?revue-lheliotrope-03-en-famille
© Photo Jean-Marc Biry
Jean-Marc Biry a gardé tous les tirages « non facturés » développés par les laboratoires de la FNAC de sa production photographique courante et familiale et décidé de les reproduire afin de les agrandir au format 50 x 60 cm, en conservant le rectangle "censeur". Si le rectangle agrandi, en apparence anodin, des images non facturées, évoque, dans notre inconscient collectif, le rectangle de la censure recouvrant par exemple les sexes dans les images jugées pornographiques, ou encore celui recouvrant le regard d'une personne lorsque la justice ou la presse a décidé ou est obligée de préserver son anonymat, la proposition est ici inversée par le photographe : l'étiquette plus ou moins honteuse devient en quelque sorte label de qualité.
Photo © Bruno Haumont-Asensio,
« Diaro 2009 » ( Great Wall)
Je lis ce dimanche 30 août un commentaire sur Flickr, accompagnant une photo de Bruno Haumont-Asensio : « Tu es prêt pour la Foto Povera. » Non seulement le photographe est prêt, mais selon moi, qui regarde depuis plusieurs mois avec beaucoup d'intérêt son travail, il fait selon pleinement partie de ce courant.
Les dernières images téléchargées, qui font partie de la série « Diaro 2009 », me font beaucoup penser à certaines vues de bord de mer d'Oscar Molina (http://www.oscarmolina.com/), hélas mal connu en France – même si Oscar pratique plutôt le noir et blanc comme Bernard Plossu dont il est d'ailleurs l'ami dans la vie, et artistiquement l'alter ego espagnol. Le photographe confie aimer aussi beaucoup les images de Vari Caramès (http://www.varicarames.com/)
« [les] photos ont été prises avec un Great Wall, un vieil appareil chinois que j'affectionne tout particulièrement ; je ne pourrais te dire pourquoi, peut-être à cause du flou qu'il produit, de son look (il ne ressemble à aucun autre).
Les falaises photographiées s'effacent doucement, dans un fondu atmosphérique bleu vert qui se confondent avec celui de l'horizon liquide, paisible et immobile. Certaines images aident à vivre, procurent une présence apaisante. C'est ce que je recherche souvent dans mes « Littoralités », et c'est ce que ressens face aux images de Bruno réalisées avec des appareils-jouets.
Photographie et cinéma : deux moyens d'expression proches et pourtant si différents (Philippe Dubois, dans L'Acte photographique distingue par exemple le « hors-cadre » du « hors-champs »... ) qui entretiennent depuis toujours des relations naturelles, chaque language ne cessant de citer l'autre, de le mettre en abyme...
Dans les années 1960, nombre de photographes ont ainsi commencé à réaliser (au 60e de s.) des captures d'écrans TV, fasciné par la trame obtenue, la dégradation étrange du signal ; plus tard, des artistes tels que Bruno Debon ont, pour les mêmes raisons utilisé le Polaroïd SX-70 et moi-même depuis un an, j'ai développé une recherche similaire, en numérique cette fois, avec mon Sony Cybershot...
Photo Pierryl Peytavi, de la série « télé-visions, 2009 »
« Il y a quelques années, j'ai essayé de faire une photo, une seule photo, quelque chose comme un portrait, un autoportrait peut-être, mais sans moi et sans personne, seulement une présence, entière et nue, douloureuse et simple, sans arrière-plan et presque sans lumière. »
(Jean-Philippe Toussaint, L'appareil-photo, 1988)
Lorsque je me photographie avec mon sténopé, j'aime l'estompe due l'absence d'optique : mon visage mis à distance, de plus en plus flou, semble libéré du poids de l'existence... Un visage qui disparaît doucement lorsqu'il s'observe. Une manière d'anti-autoportrait ?...
Photo Dominique Mérigard
« Anti-poussière pas sorcière », affirme Judith dans son autoportrait nu au balai. Cette dénégation est-elle à prendre au pied de la lettre ? Que sait-on d’elle, à part qu’en ces temps où l’on ne parle plus que de méga pixel, elle persiste à prendre ses photographies à l’aide d’une boîte à thé percée d’un trou ? N’y a-t-il pas de la magie dans la façon de faire ? Et pour filer le contresens assumé, la femme-artiste n’est-elle pas nécessairement sorcière ? Surtout si elle décide, en dehors de toute médiation masculine, de mettre en scène son propre corps nu. Devant un corps sinueux comme un serpent qui s’élève au-dessus de nous, avec la perspective arrondie caractéristique du sténopé qui plonge les coins de sa chambre dans une pénombre évocatrice, on se sent comme au fond de sa marmite à potion qu’elle scrute et s’apprête à remuer du bout de son balai volant-baguette magique-cuillère en bois.
« Anti-poussière pas sorcière », Judith le dit et nous devons la croire, ce balai n’est pas un balai de sorcière, n’est pas un sceptre de reine, n’est pas une colonne du temple. C’est un bête balai, un pauvre outil prosaïque pour dépoussiérer les sols, moins efficacement qu’un vrombissant aspirateur, tellement moins magique que ces nouveaux aspirateurs automatiques : ne perdez plus de temps à nettoyer vos sols : l'aspirateur Roomba dans l’air 1600 le fait pour vous ! La poussière, ennemie ancestrale des femmes au foyer et des photographes, est la double ennemie de la femme photographe qu’est Judith, qui choisit de se mettre en scène en femme d’intérieur (le reste de son travail de reportage dans les rues de Massy, nous montre que c’est une mise en scène et que si elle est cela, elle est bien plus que cela...)
« Anti-poussière, pas sorcière », le titre est donc humoristique, ironique. C’est une caractéristique récurrente des autoportraits nus féminins, une caractéristique irritante pour certains amateurs d’art et de corps, comme Edgar Morin en éditorial d’un magazine Photo spécial autoportraits nus féminins qui préfère un autoportrait nu « humble », « sérieux », voire « tragique ». Mais Judith n’a que faire de l'humilité, et réserve son sérieux, sa capacité d’exprimer le tragique, par exemple la tragédie sociale d’une « Allée de Bagdad » jonchée d’ordures, avec des barres de béton à perte de vue en arrière-plan. Pour l’autoportrait nu, espace de liberté artistique, la pirouette est permise. Par exemple Judith se représente comme prête à passer un petit coup de balai, mais vêtue d’un simple slip noir et surtout, de chaussures à talon qui à la fois gainent et dévoilent la jambe et font d’elle une troublante « sténo-pin-up ». De même, la pose, assise, les jambes écartées, la main en appui sur la cuisse, pourrait être vulgaire et ne l’est pas par la magie de sa boîte à photo, qui floute, déforme, adoucit les contours et exagère les ombres, et transforme ces jambes en M, en zig-zag d’éclair, en courbe croissante puis décroissante qui enchante…
« Anti-poussière » pas sorcière, d’accord. Le balai n’est pas un balai volant, d’accord. Judith Baudinet n’est pas Hermione Granger, d’accord. Nous, spectateurs, ne sommes pas non plus un crapaud barbotant dans un chaudron. Mais comment évacuer si facilement la magie du procédé ? Une femme qui attrape des images dans une boîte n’est-elle pas nécessairement magicienne ?
(Juliette Meliah*, juillet 2009)
*« The female photographic nude, between art and non-art. A study of the conventions in the works of Mapplethorpe, Arbus and Woodman, and their artistic status », soutenu en septembre 2002, sous la direction de Claire Joubert, un mémoire de Master 2 (Paris-8, Saint -Denis) que rédige actuellement Juliette, qui, photographe, a participé par ailleurs à plusieurs étapes de Foto Povera...
http://www.flickr.com/photos/meliah/
http://www.myspace.com/lightintheface/