vendredi 26 novembre 2010

FOTO POVERA, c'est reparti !




© Photo Rémy Weité



Très sensible à la gentillesse et à l'enthousiasme des artistes exposés, ainsi que celle du public qui peut toujours visiter l'exposition FOTO POVERA 6 (Médiathèque Florian de Rambouillet) puisqu'elle est prolongée jusqu'au 1er décembre, j'ai décidé de reprendre les rênes du collectif FOTO POVERA , alors que je croyais celui-ci, il y a quelques mois encore, cédant au découragement, moribond.

Merci aussi aux intervenants des deux tables rondes pour la qualité et la générosité de leurs discussions, et bien sûr à la Direction et à l'équipe de la Médiathèque pour la qualité de leur accueil.

Pourquoi « tourner la page » lorsque cette sixième page est si belle et sensible ?...




« Les Temps calmes » d'Eric Bouttier, ou le cinéma fixe de la mémoire


© Photo Eric Bouttier, « Les yeux de Léo »



Cela évoque un format cinémascope mais celui d'un cinéma immobile (qui évoque fortement le « cinéma fixe » cher à Bernard Plossu), puisque photographique, coloré donc et légèrement tremblé, obtenu grâce à un appareil-jouet, un faux panoramique 24x36 cm. Eric Bouttier évoque avec beaucoup de douceur et de sensibilité la fin de l'enfance. Une enfance remémorée, celle d'une lente déambulation dans les lieux où li vécut en Bretagne. 

« Les Temps calmes »: si sont nécessaires les images qui « dénoncent », le sont aussi, à l'inverse, celles qui  « consolent » pour paraphraser Robert Admas (Cf. son Essai sur le Beau en phiotographie, éditions Fanlac, 1996), ou apaisent.





jeudi 25 novembre 2010

La série « DES PAYSEMENTS » d'Eric Bouttier


© Photo Eric Bouttier



Les photographies de voyages intitulée « DES PAYSEMENTS » d'Eric Bouttier ont réalisée avec un appareil en plastique doté de 4 objectifs (proche de l'Action Sampler commercialisé par la lormographie). Des extraits du septième volet (un trajet de 6 mois en transports en commun entre Paris et Beyrouth réalisé cette année) ont étés montrés à Paris-Photo sur le stand de la galerie du jour / agnès b.

Il utilise, parallèlement à ce travail, un autre appareil-jouet, un faux panoramique 24x36 cm, avec lequel il a réalisé une série en couleurs sur la fin de l'enfance qui a la forme d'un diaporama sonore de 11 minutes, « Les Temps calmes », (il travaille actuellement sur sa suite, « Le Voyage incertain »).

« DES PAYSEMENTS est une exploration esthétique sur la photographie de voyage, une esquisse sensorielle sur la sensation d’être étranger au monde, sur cet état du voyageur pour qui le regard porté sur chacun de ces territoires est neuf, inédit. Cette série compte 6 volets à ce jour. Chaque territoire (La Paz, Beijing-Shanghaï, St Petersburg, la Slavonie, Mayotte, Hong-Kong) découvert - toujours pour la première fois - est appréhendé comme un chapitre à part entière: à chaque voyage, son propre mode d’être au monde. Ce sont des paysages qui sont uniquement traversés (il n’y est jamais question d’immersion): inconnus, entre aperçus, non appropriés, et déjà passés. Les photographies sont faites le plus souvent dans ce mouvement incessant, dans cette temporalité de l’immédiateté propre au voyage. De cette vision chaotique de territoires insaisissables découle une succession d’images qui sont ainsi les instantanés de cette première impression, brute et directe.

Par la déconstruction de l’image qu’il opère, l’appareil lomographique (appareil – jouet muni de quatre objectifs) s’est imposé comme le moyen photographique privilégié afin de retranscrire ces différentes sensations. Sa maniabilité, qui permet d’être toujours dans l’instant et le mouvement, induit un rapport immédiatement physique de retranscription. Il propose également une séquence fragmentée d’images qui s’intercale entre l’unicité de l’image photographique et le défilement cinématographique – ce n’est plus 24 images par seconde, mais 4 images sur 2 secondes. Le regroupement des quatre images en une seule joue sur la répétition, l’étirement spatial et temporel d’un même motif, comme une pause, ou au contraire sur la confrontation: les accidents, la déconstruction, la reconstruction. Comme en un long travelling horizontal, les séries se construisent sur le rythme accidenté d’une image chassant l’autre.

De la même façon que DES PAYSEMENTS se saisit d’une technique spécifique – quatre images en une - afin de rendre compte d’une vision chaotique, fragmentée, D’ICI (vidéo d’après film super-8, 8 mn, 2007) utilise le medium du Super-8 comme instrument de mémoire des lieux de l’enfance. Kerhouarn, Mériadec : une petite parcelle du Morbihan, en Bretagne, territoire d’origine, dépositaire d’un passé familial collectif. Chaque retour aux sources voit resurgir les mêmes rituels, les mêmes petites cérémonies, et réactive les mêmes images, déclenche les mêmes réminiscences. A la lisière du passé et du présent, "D’ici" entend cartographier les traces actuelles du souvenir dans ce territoire qui demeure étrangement inchangé, comme si le temps y glissait sans le transformer.

Travail sur le temps, sur les ruptures entre épilepsie et contemplation, saccades et ponctuations, le défilement des images, rapide, saccadé et répétitif, évoque les pages d’un album de famille que l’on tournerait trop rapidement. Entre essai documentaire et film expérimental, un labyrinthe d’images arrachées au flux de la mémoire se dresse alors, prenant comme fil conducteur la figure tutélaire de ma grand-mère, et mène le spectateur vers des paysages à la fois rêvés et remémorés.

Utilisation d’un appareil jouet (DES PAYSEMENTS), films Super-8 (D’ici): ces techniques low-tech sont choisies tant pour leur relative simplicité et maniabilité, qui permet d’être dans une plus grande spontanéité, que pour leur aspect amateur et les pratiques collectives et populaires qui y sont liées. Il s’agit toujours de chercher à capter l’instant dans son émotion la plus intense; pour reprendre le titre d’un film du cinéaste expérimental Jonas Mekas: ˜ As I Was Moving Ahead Occasionally I Saw Brief Glimpses of Beauty ˜.

Ces travaux correspondent également à une certaine forme d’intimité : ˜D’ici ˜, le travail le plus ancien, le plus directement intime, est une archéologie de l’enfance répondant à la question fondamentale du territoire d’origine. A la répétition rassurante et obsessionnelle d’un même motif (le territoire d’origine, l’enracinement du quotidien) répond la fragmentation spatiale des mondes inconnus, des territoires voyagés. A l’évidence tellurique de la terre bretonne répondent les errements, les pertes et les déroutes fragmentaires à l’œuvre dans DES PAYSEMENTS. »

(Eric Bouttier)


mercredi 17 novembre 2010

« POLA-LAND » exposition de mes Polaroids à la galerie Satellite, Paris 10e, 9 novembre - 4 décembre 2010 (la suite)


Exposition des Polaroids de Yannick Vigouroux
à la galerie Satellite, Paris, jusqu'au 4 décembre 2010




« Pola-Land » : j'ai eu l'idée de ce titre de série en songeant à celui de mon ami Christophe Mauberret, « Voigtland », au sujet de laquelle il a déclaré : " [...] disons que le résultat se juge à l'aune du spatio-temporel. Le grand bénéfice pour moi est de créer un apparentement des images qui désormais font famille. »"

« Pola-Land », parce que l'inventeur du film instantané Polaroid (http://www.ledevoir.com/culture/182008/la-fin-du-polaroid), fut, en 1948, Edwin H. Land. Et que belle coïncidence (ou prédestination), « Land » signifie en anglais « terre », « pays », « territoire »...

« Pola-Land » donc : un pays, territoire photographique du procédé Polaroid qui unifierait la vision. J'aime les utopies, le pari aussi de l'image qui fictionne, avant tout, quelle que soit sa qualité (ou sans qualité...). L'idée d'un monde que j' imagine fluide et délavé par des nappes de flou (depuis le début des années 1990, j'ai utilisé exclusivement des Polaroids amateurs dans ma pratique personnelle) brouillé et tramé de brumes mentales (à l'images des photos faites au Diana dans les pays de l'Europe de l'Est par Didier Cholodnicki, la série « De nulle part ») ; aux couleurs saturées aussi, au flash dématérialisant (Cf. mes « Flux de conscience »).

On aurait fait le choix de de ce monde-là, mental, de ne plus vivre et flâner que dans ce monde trouble et troublant où formes et couleurs crépitent, palpitent sourdement.

« Pola-Land », c'est aussi le titre de l'exposition à laquelle j'ai le plaisir de participer avec trois autres artistes, Ed Lisieski, Esmeralda Soares et Didier Tatard, à l'invitation de Xaxier Martel, à la galerie Satellite (Paris).

Yannick Vigouroux





Commissaire d'exposition : Xavier Martel,
un grand merci à Xavier, ainsi qu'à la galerie Satellite

Une exposition présentée "dans le cadre du Mois de la Photo-OFF".
This show is presented in the framework of the OFF Month of Photography festival.

lundi 15 novembre 2010

Douceur et sensualité du flou photographique (les images de Joseph Charroy)


© Photo Joseph Charroy





« Bonjour,
je viens de passer un bon moment à naviguer sur l'ancien blog de Foto Povera et j'y fais beaucoup de belles découvertes. Je ne connaissais pas non plus le travail Felten-Massinger. J'aime beaucoup votre approche de la photographie, être sensible à la fragilité des choses, dégrader le signe et atomiser les informations, c'est aussi une ligne directrice pour moi. Être dans un rapport anachronique et modeste avec le monde, c'est salvateur à notre époque.

Pour ma part j'ai commencé à travailler en noir et blanc avec un appareil Minox 35mm, en réalisant le développement et les tirages, puis je me suis procuré un peu par hasard un Lubitel et j'ai adoré travailler en moyen format... ensuite je me suis procuré un Diana, et régulièrement je récupère de vieux appareils sur les marchés aux puces. J'aime bien changer d'instrument. Dernièrement j'ai perdu mon Diana et je me suis procuré un vieux Zeiss Box-Tengor. Cet été j'ai commencé à faire de la couleurs à l'occasion d'un petit voyage et j'ai fort envie de continuer.
je vous envoie quelques images... »
(extrait de l'e-mail reçu le 24 octobre 2010)


J'ai d'emblée aimé la série de photographie qu'il avait joint à son courrier.

Une image a tout particulièrement retenu mon attention. Le visage lumineux d'une jeune femme, partiellement enveloppé par la courbe sombre d'unr capuche qui le dissimule partiellement autant qu'il le révèle, fait face à l'objectif. Un beau moment d'échange, de complicité qu'encourage si volontiers les appareils en plastique tels que les Diana ou les Holga (ils n'est pas insignifiant qu'on leur ai donnés des prénoms féminins...), si inoffensifs. Ces appareils-jouets désamorcent en effet toute tension : le regard du photographe n'a plus rien de prédateur, il n'est, au contraire, que douceur et sensualité.